Lors d’un jugement récent de la Cour supérieure dans l’affaire Municipalité de Notre-Dame-de-la-Merci c. Desjardins, il nous apparaît que plusieurs précisions ont été apportées sur les devoirs d’une municipalité en matière de protection des bandes riveraines en bordure des lacs et cours d’eau. La municipalité de Notre-Dame-de-la-Merci avait en effet entrepris un recours en injonction pour remise en état des lieux et en dommages après que le défendeur eut complètement déboisé la bande riveraine sur sa propriété, laquelle était, avant ces travaux, complètement à l’état naturel.  Le comportement du citoyen était d’autant plus fâcheux qu’il avait été dûment avisé des normes réglementaires applicables sur sa propriété avant d’entreprendre ses travaux.  Le règlement exige le maintien de la végétation dans la bande riveraines sur une profondeur de 15 m à cet endroit.

L’analyse du CQDE va comme suit.  

Ce jugement nous apparaît créer un précédent en ce que:

  • pour la première fois un tribunal reconnaît que la contravention à une norme réglementaire municipale, en l’occurence le règlement de zonage et les mesures de protection des bandes riveraines, peut constituer une faute civile donnant ouverture à l’octroi de dommages compensatoires pour la municipalité qui a entrepris de faire respecter sa réglementation (mentionnons que la municipalité avait par ailleurs obtenu une ordonnance de remise en état des lieux);
  • le tribunal considère que les frais d’avocats font partie des dommages subis par la municipalité et il octroie, du moins en partie, un dédommagement à ce chapitre; le Tribunal n’en réfère pas à l’affaire Viel et n’applique pas les principes de cette décision pour octroyer une partie des honoraires extrajudiciaire;
  • s’appuyant sur les affaires Canfor, de la Cour suprême, et Wallot de la Cour d’appel, le Tribunal réitère le rôle de fiduciaire de l’environnement que jouent les municipalités et il souligne qu’elle ont un devoir d’intervenir pour faire respecter leur réglementation en matière de protection de l’environnement.

J’attire particulièrement votre attention sur le paragraphe 72 du jugement qui établira dorénavant,

[72] Il convient de mettre en relief l’importance de la réglementation en cause et le fait que la municipalité se doive d’appliquer ladite réglementation.  La municipalité doit agir et intervenir face à ce citoyen qui agit à l’encontre des règles applicables en matière de protection des bandes riveraines.  Elle avait l’obligation d’intervenir et de faire ce qu’elle a fait dans le présent dossier.  Les nombreux appels de citoyens auprès de la municipalité constituaient un rappel de ce devoir.

Le Tribunal a par ailleurs refusé de se rendre aux arguments de la municipalité sur deux éléments:

  • reconnaître que les heures supplémentaires que l’administration municipale a dû consacrées au suivi de ce dossier comme un dommage;
  • accorder des dommages exemplaires pour l’atteinte à la qualité de l’environnement.