Le CQDE maintient qu’une évaluation environnementale rigoureuse provinciale est tout à fait nécessaire et pertinente. Le ministère de l’Environnement du Québec et le Bureau d’audiences publiques sur l’environnement seront certainement appelés à se pencher sur ce projet. Par ailleurs et au regard des impacts climatiques et des impacts potentiels sur le fleuve St-Laurent, le CQDE est d’avis qu’il est également justifié que le gouvernement fédéral procède à une évaluation d’impact. Le CQDE estime que chacun des paliers de gouvernement doit agir pleinement pour la protection de l’environnement, dans le respect du partage des compétences. 

LETTRE

Monsieur le Ministre,

Le gouvernement du Québec a présenté le lundi 17 mai dernier un projet de tunnel autoroutier entre Québec et Lévis. Ce projet propose la construction d’un tunnel sous le fleuve Saint-Laurent pour relier les deux rives.

La Loi sur l’évaluation d’impact vous donne le pouvoir de soumettre des projets qui ne sont pas visés par le Règlement sur les activités concrètes à une évaluation d’impact. Ce pouvoir discrétionnaire peut notamment être exercé si des préoccupations du public justifient qu’un projet soit soumis à une évaluation d’impact.

Le projet de tunnel autoroutier entre Québec et Lévis est sans contredit un projet qui soulève de vives préoccupations et inquiétudes au sein de la population de la région de la Capitale-Nationale, mais aussi dans différentes régions à travers le Québec. Les préoccupations environnementales relatives à ce projet sont multiples et le CQDE fait partie des groupes qui sont préoccupés par les effets directs et accessoires négatifs que pourrait entraîner ce projet autoroutier. 

Ce projet est susceptible d’engendrer des impacts environnementaux majeurs, notamment en augmentant les émissions de gaz à effet de serre par trafic induit. Alors que les efforts de décarbonisation de l’économie doivent s’accentuer afin d’atteindre l’objectif de carboneutralité fixé par le gouvernement canadien pour 2050, il est impératif d’évaluer les impacts d’un tel projet, notamment au regard des engagements climatiques du Canada.

Ce projet est également susceptible d’engendrer des impacts environnementaux sur le fleuve Saint-Laurent. Nous savons que l’Agence d’évaluation d’impact analyse l’opportunité de réaliser une évaluation environnementale régionale du fleuve Saint-Laurent à la suite d’une demande qui vous a été faite et que vous avez indiqué qu’une décision à ce sujet serait prise cet automne. L’évaluation environnementale régionale est un outil qui doit permettre d’évaluer les impacts de projets passés et futurs et d’identifier des enjeux qui doivent être pris en compte dans les évaluations des projets proposés dans ces régions. La réalisation d’une telle étude peut notamment permettre de mieux identifier les enjeux qui doivent être par la suite pris en compte dans les évaluations d’impact de projets. Dans ce contexte, nous sommes d’avis que tout projet proposé et susceptible d’avoir un impact direct ou accessoire sur le fleuve Saint-Laurent devrait être soumis à une évaluation d’impact fédérale. 

Enfin, le CQDE réitère une proposition faite dans le cadre de l’étude du projet de loi C-12, à savoir l’importance de soumettre à une analyse climatique toute décision du gouvernement fédéral, notamment celles reliées aux différents types d’investissement public. Afin de démontrer son sérieux dans l’atteinte de la carboneutralité et d’assurer l’exemplarité de l’État, les décisions gouvernementales devraient être soumises à une analyse rigoureuse et transparente des effets environnementaux associés aux orientations et décisions gouvernementales. Dans l’éventualité où le gouvernement provincial demanderait l’aide financière du gouvernement fédéral, le CQDE invite ce dernier à fonder sa décision sur une évaluation rigoureuse des possibles impacts environnementaux et climatiques associés à ce projet.

À la lumière des préoccupations ci-haut mentionnées, nous vous recommandons de soumettre le projet de tunnel autoroutier entre Québec et Lévis à une évaluation environnementale fédérale afin, notamment, d’évaluer les impacts que pourrait avoir un tel projet sur le fleuve Saint-Laurent et afin de s’assurer que le Canada puisse respecter ses obligations et engagements en matière climatique. 

En vous remerciant pour votre attention, Monsieur le Ministre, je vous prie d’agréer l’expression de ma considération respectueuse et demeure disponible pour échanger plus en avant sur les recommandations formulées dans la présente.

Geneviève Paul,

directrice générale du Centre québécois du droit de l’environnement