La victoire récente devant la Cour suprême du Canada dans le dossier de la rainette faux-grillon de l’Ouest a soulevé de nombreuses questions sur la protection de cette espèce.

Quelles sont les implications de cette décision pour de futurs projets qui pourraient avoir un impact sur l’habit de la rainette ou pour la protection des espèces à statut précaire en général? Que signifie la fin de cette saga judiciaire qui a duré plus de 7 ans?

Pour comprendre ce dossier, nous avons compilé pour vous des réponses aux questions qui nous ont été les plus posées.

Le 10 décembre 2020, la Cour suprême du Canada refuse d’entendre l’appel d’un promoteur qui contestait la décision de la Cour d’appel fédérale sur la constitutionnalité du décret d’urgence fédéral pour protéger la rainette faux-grillon de l’ouest. Par le fait même, la Cour suprême confirme la décision de la Cour d’appel fédérale.

Cette décision majeure pour la protection des espèces à statut précaire conclut une saga judiciaire de près de 7 ans durant laquelle le CQDE a multiplié les démarches pour protéger la plus petite et plus menacée des grenouilles du Québec depuis 2013. 

Cette décision confirme la validité du décret d’urgence fédéral. La Cour conclut que le décret n’empiète pas sur les compétences provinciales ni ne contourne les processus d’autorisation environnementale provinciaux ou municipaux. Rappelons que le décret d’urgence fédéral a été adopté à la suite de démarches du CQDE et de Nature Québec. Il s’agit du premier décret d’urgence en terres privées adopté en vertu de la Loi sur les espèces en péril. Il vise à prévenir la perte ou la dégradation de l’habitat dont la rainette faux-grillon de l’Ouest a besoin pour croître et se reproduire.

Menacée notamment par l’étalement urbain, la rainette faux-grillon, qui vit et se reproduit dans les milieux humides, a perdu 90 % de son aire de répartition (soit la zone géographique où l’espèce est présente) en Montérégie au cours des dernières décennies. Devant le refus de la Ville de La Prairie et d’un promoteur privé de suspendre les travaux pour un projet domiciliaire qui aurait détruit une partie importante de l’habitat essentiel de la rainette, le CQDE et ses partenaires ont multiplié les démarches pour la protéger.

Parce qu’il est urgent et nécessaire de freiner la destruction de la biodiversité, ce combat judiciaire se veut également un message fort pour la protection des espèces à statut précaire en général.

Grâce à cette décision confirmant la validité du décret d’urgence fédéral, nous savons maintenant que le palier fédéral peut utiliser ce pouvoir dans le respect du partage des compétences. Il sera sans doute invité à le faire de plus en plus fréquemment, à moins que le Québec ne modernise rapidement sa protection provinciale pour assurer une protection adéquate de la biodiversité et éviter que le fédéral n’ait à utiliser ce pouvoir.

Le décret d’urgence fédéral mis en place pour protéger cette espèce couvre des territoires à La Prairie, Candiac et Saint-Philippe. Les autres parties de l’habitat essentiel de la rainette ne sont pas couvertes par le décret, mais les principes ayant mené à ce décret pourraient s’appliquer ailleurs.

Comme indiqué ci-dessus, le décret d’urgence qui faisait l’objet du litige couvre des territoires à La Prairie, Candiac et Saint-Philippe. Les autres parties de l’habitat essentiel de la rainette ne sont pas couvertes par le décret.

Pour l’une des situations à Longueuil lors de laquelle l’habitat essentiel de la rainette a été endommagé par des travaux illégaux, le décret d’urgence fédéral ne s’applique pas, mais la municipalité aurait déjà émis un constat d’infraction et le ministère de l’Environnement du Québec enquête et pourrait éventuellement prendre des mesures pour sanctionner les activités récentes. Si les autorités municipales et provinciales prennent des mesures suffisantes, les autorités fédérales ne peuvent pas utiliser ce pouvoir spécifique de prendre un décret d’urgence.

Pour d’autres projets, comme l’agrandissement du Port de Montréal, le décret d’urgence fédéral ne s’applique pas. Il demeure néanmoins important de vérifier si ces projets sont conformes aux autres règles fédérales quant à la protection des espèces à statut précaire.

Si vous avez connaissance de travaux pouvant porter atteinte à l’habitat de la rainette ou d’une autre espèce à statut précaire, n’hésitez pas à les signaler à votre municipalité et au ministère de l’Environnement du Québec, idéalement par écrit. Ils ont un rôle important à jouer pour la protection de la biodiversité.

Nous vous invitons également à consulter notre banque d’information juridique vulgarisée en droit de l’environnement (voir notamment Comment savoir si une espèce est protégée).

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